De la Chine à la Provence
ZAO-WOU-KI – Il ne fait jamais nuit
Exposition à l’hôtel de Caumont-Centre d’Art à Aix-en-Provence
Les artistes puisent toujours leur inspiration chez les artistes qui les ont précédés, chez les grands maîtres. S’ils le peuvent, ils visitent les musées, les galeries, ils copient, ils s’approprient, puis ils réinventent à leur manière ce qu’ils ont observé, admiré, travaillé.
Zao Wou-Ki n’échappe pas à la règle !
Une des premières œuvres connues du peintre chinois est une nature morte aux pommes de 1935-36. Les couleurs, la touche, la lumière, la composition ne sont pas sans nous rappeler les nombreuses natures mortes réalisées par Paul Cézanne. Zao Wou-Ki n’a que 15 ans, il vient de rentrer à l’école des beaux-arts de Hangzhou quand il réalise cette œuvre académique et figurative, il est en pleine exploration.
Il n’a pourtant jamais quitté la Chine, mais il a eu accès à des reproductions, des livres, des cartes postales et l’apprentissage à l’école de beaux-arts est dispensé à la fois par des professeurs chinois et par des professeurs occidentaux. Il s’éloigne très rapidement de la tradition de son pays, délaisse l’encre et commence très tôt le travail à l’huile.
Cézanne ne sera pas le seul artiste occidental à inspirer Zao Wou-ki mais c’est l’un des premiers. Soixante-dix plus tard, il réalise une œuvre qui est un hommage au peintre aixois. Ces hommages font partie de la tradition chinoise, ce dyptique atteste l’admiration et le respect qu’il pouvait avoir pour le grand maître de l’histoire de l’art moderne. Bien sûr, ces soixante- dix années de créations lui permettent de se détacher de l’œuvre originale. Ces deux tableaux réalisés quasiment aux deux extrémités de la carrière du peintre, nous montre son évolution. Cette toile, intitulée hommage à Cézanne 06-11-2005 réinterprète une Sainte Victoire au grand pin, peinte par Cézanne en 1887. Zao Wou-ki a déstructuré, synthétisé l’espace, qui devient évanescent, éphémère contrairement à la Sainte Victoire solide et minérale de Cézanne. La lumière et les couleurs sont vibrantes, le grand pin est le seul élément figuratif. Il s’émancipe complètement par rapport au tableau original, mais assume ses origines.
L’exposition présentée à l’hôtel de Caumont jusqu’au 10 octobre 2021 montre la complexité de l’œuvre de Zao Wou-ki, ses sources d’inspirations, cette dualité entre la tradition chinoise et l’art occidental, ses périodes figuratives et abstraites et surtout le magnifique travail qu’il fera sur la lumière.
Carole Deniel pour Provence Buissonnière